Il y a trente ans était assassiné Abdenbi
Alors que le soleil commence à décliner en ce samedi 23 octobre 1982, la cité blanche se plonge peu à peu dans l’obscurité.
Comme souvent les jours de week-end, les enfants s’attardent dehors un peu plus longuement que d’ordinaire gambadant le long des allées, bouclant leur rallye au volant des vielles carcasses de voiture abandonnées sur le parking ou mettant un point d’honneur à ponctuer une partie de football acharnée sur l’un des nombreux terrains vagues qui jouxtent la cité, quand retentissent plusieurs coups de fusils. Une des balles, tirée d’un pavillon voisin (68, rue A. Doucet), atteint en plein ventre Abdenbi GUEMIAH (qu’il repose en paix), jeune étudiant âgé de 19 ans.
Alors qu’il rentrait de la mosquée, Abdenbi s’écroule par terre, à quelques pas des fenêtres du logement de ses parents. Evacué d’abord vers l’hôpital de Nanterre, puis vers La Pitié à Paris, Abdenbi succombe 13 jours plus tard.
Lycéen en terminale G au lycée Joliot-Curie, Abdenbi est né à Nanterre. Entreprenant et dévoué, il joue très souvent le rôle de conciliateur au sein de son établissement dont le corps enseignant appréciait sa personnalité très attachante. Outre sa passion pour la musique et la poésie (dont il animait un club de poètes), il avait l’ambition de s’inscrire à l’Institut des Hautes Etudes Cinématographiques pour devenir réalisateur de cinéma.
Ouvert sur les autres et doté d’un esprit de tolérance sans limite, il avait ce don singulier de savoir écouter ses amis, ses voisins, les adultes comme les plus jeunes générations. Passionné par les relations humaines et soucieux de l’avenir des gamins, il ne comptait ni son temps, ni son énergie pour leur prodiguer conseils et recommandations. Alors que l’échec scolaire faisait des ravages dans les rangs de plusieurs familles de la cité, Abdenbi mettait tout en œuvre pour inscrire au cœur de la mission de « l’association Gutenberg » la réussite éducative et scolaire. Association dont il fut l’un des membres fondateurs et en fut son trésorier. Sans doute que les plus jeunes d’entre nous se souviennent encore des animations de loisirs dont ils ont bénéficiées.
Profondément croyant et charitable, il s’intéressait aux questions d’ordre philosophiques et cultuelles, particulièrement celles traitant des relations inter-religieuses. Sa foi en Dieu constituait l’essence de sa force et de sa sagesse. Gisant au sol et se rendant compte qu’il allait mourir, il chargea un de ses proches, resté à ses côtés en attendant l’intervention des premiers secours, d’aller demander le pardon à tous ceux à qui il avait pu faire du mal.
En tendant la main une dernière fois vers les autres, Abdenbi confirmait qu’il était ce trait d’union qui nous manque tant aujourd’hui.
La chanson en hommage à Abdenbi :
Mohamed SELMET
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